We’re far from the shallow

Les lumières meurent dans la vaste obscurité d’une nuit éternelle. Béatrice, elle a cru mourir, alors que sa voix s’égarait dans l’immensité d’un monde qui ressemblait au sien mais qui n’avait pourtant rien à voir. Les nappes en dentelles, le tablier coloré, la lumière du jour qui filtre à travers les rideaux de la cuisine, Jonesy qui jappe dans le jardin, les enfants qui lui courent après, la mousse légère qui s’envole de l’évier pendant la vaisselle, l’odeur de la tarte aux pommes qui occupe la maison, le baiser furtif de Ryan sur sa joue, le claquement de la porte.

Béatrice, elle a ouvert les yeux sur l’enfer. Terminé, la chaleur pastel des joues de Sally. Terminé, le sourire troué par les dents de lait envolées de Jack. Terminé, le parfum enivrant de l’eau de cologne de Ryan. Terminé, ce décors en plastique qui cadrait sa vie entière. Tout n’était plus que déflagration.

Les premiers jours, Béatrice n’avait fait que pleurer, crier, s’énerver, déchirer petit à petit ce visage de perfection qu’elle avait façonné par sa seule force psychique. Mais l’enfer n’accueille que les âmes mauvaises. Ici, pas besoin de servir le sourire de carton habituel, ce n’était qu’une question d’instinct.

Même dans cette dimension cauchemardesque, une mère n’oublie jamais le chemin du foyer. Les pas la guident toujours ici, automatisme ancré, elle ne peut s’empêcher de caresser les portes des chambres de ses enfants. Celle de son aîné finissait toujours par être son refuge, comme si le petit homme de cette maison était capable de la protéger, où qu’elle aille. -Car oui, Béatrice n’était pas naïve, Ryan s’enfuirait en courant au premier coup de vent, à l’inverse de Jack qu’elle pensait bien plus téméraire.-

Il y a dans l’air glaciale un soupçon de familiarité. Quelque chose que Béatrice n’arrive pas à saisir, comme une présence. Elle croit même entendre des notes de musiques qui font trembler les murs sans qu’il n’y ait personne aux alentours. Et d’un coup, c’est comme si la pression était plus forte, pourtant, rien ne change. A moins que … ?

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