Dans la petite ville d'Aster Cove, des choses étranges se passent...

 
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 (ambrose) les sanglots longs des violons

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MessageSujet: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyMer 16 Jan - 18:53


22 Octobre 1985

« Salut la belle au bois dormant... »

Les trombes d’eau déferlent sur les vitres du pick-up, Ambrose est sur le siège passager. Dans l’auto-radio les voix des journalistes s’échauffent un instant avant que les doigts de Roxanne ne s’affairent à changer de station.

I've waited hours for this
I've made myself so sick
I wish I'd stayed asleep today
I never thought this day would end
I never thought tonight could ever be
This close to me


Elle repose les yeux sur la route, la dernière fois qu’ils se sont retrouvés à bord d’une voiture elle n’avait pas encore le permis, elle connaissait le code par coeur cela dit mais, là, elle prenait l’air sérieux des adultes à essayer de distinguer le paysage traînant dans la grisaille entre les essuie-glace. 

« Y a de quoi manger dans la boîte à gants. »

Difficile de dire si elle voulait sérieusement éviter l’accident ou si la vision du jeune homme sous les couvertures épaisses à côté d’elle lui était insupportable. Après tout pour certaines personnes, l’expression « je ne peux pas le voir en peinture » s’illustrait particulièrement bien avec Ambrose Brown, mais Roxanne n’en savait rien. 

En vérité elle était tendue sur son siège, elle sentait les glissement des vieux pneus sous elle et chaque virage était un supplice, le seul soulagement se lisait dans le nombre de rapports d’accidents de la route par an à Aster Cove: quasi nul, ça non plus, Roxanne n’en savait rien.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyDim 20 Jan - 0:13




C’était comme une courbe familière, le reflet d’une mâchoire molle recouverte des repousses d’une barbes claire, une tâche sur le mur qui cavale dans un mouvement aléatoire, suivant la spirale des boucles blondes qui s’accrochent au rideau de douche. Parfois, il entendait des voix, Ambrose. Parfois, il voyait des flashs de lumières, l’ampoule de cette salle de bain moisie qui clignote et parfois, même, il trouvait ça joli, il trouvait que ça sonnait comme le rire de Jeff.

Un petit carré sur la langue qui fait tourner ses pupilles et la baignoire semble si grande alors que ses jambes se cognent contre les bords. Et le pommeau de douche ressemble à un morceau de casque, une oreille déchirée qui pleure devant les plaintes muettes d’un esprit inconnu. Les sanglots coulent tellement fort qu’Ambrose peut les sentir contre ses organes, une sorte d’acide qui dissout l’intérieur de son corps et il a l’impression de vomir son âme tellement ça le dégoûte.

Ca pleure, ça pleure tellement fort que quand il reprend ses esprits, Ambrose admire les gouttes de pluies qui se suicident sur le parebrise de la voiture. Gouttes de peine, goutte de peur, ça perle sur son front et ça coule dans sa gorge, il étouffe alors qu’il est tout débraillé. Ses yeux brûlent et la voix de Roxanne résonne, echo bourdonnant qui se marie bien avec la mélodie hachée de la radio.

Y’avait ce chocolat à moitié fondu dans un reste d’emballage et la faim qui dévorait son ventre n’a pas fait la différence. Ca colle aux doigts, ça tâche la bouche, ça repeint le palais et ça coule, difficilement, mais ça continue de couler, à l’intérieur. Et même dans ce carnage gourmand, Ambrose, il a toujours cet aura inatteignable. Même avec ses cheveux en bataille, même avec ses vêtements enfilés à la va-vite, froissés, même avec le teint livide et la tâche au coin des lèvres, Ambrose, il restait loin des autres, loin de tout.

« The Cure, hm. J’aime bien. »

Ces petits mots, c’était trop dur, pour lui. Le visage de marbre, il pouvait pas s’en défaire, mais il pouvait pas nier non plus. C’était trop tard. Roxanne, elle avait vu la fissure, les dégâts que ça cache et Ambrose, il arrivait toujours à faire semblant, même s’il avait plus envie.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyMar 22 Jan - 21:11

Aster Cove était un labyrinthe, plus grand en apparence que ce qu'il était vraiment: un amas de routes menant vers un destin tragique, la seule consolation de Roxanne Bishop, là maintenant résidait dans le bruit du moteur couvert à moitié par la voix d'un chanteur désespéré. Elle ne pouvait pas dire que comme lui, elle accrochait à son timbre dans lequel le myocarde semblait menacer de rompre à chaque couplet.

Elle n'était pas d'humeur à faire de grandes révélations, le coeur sur la table, mais elle se noyait dans les compilations de musique classique qui traînaient dans les affaires de son ancien ami, ça lui rappelait un autre, un passionné. Profondément. Comme Ambrose Brown l'était au passage, un ancien ami, qui se souviendrait seulement de la moitié d'une conversation le lendemain. Pourquoi avait-elle accepté de jouer les baby-sitter à un stade aussi avancé de son cancer social? Incapable de se retenir de dire non quand son prénom, liqueur vénéneuse venait sur le plateau dans une visqueuse sentimentalité, Roxanne pensait ne pas le revoir. D'ailleurs elle pensait ne revoir personne, mais la voici, à bord d'une voiture, elle a pour compagnon de route Ambrose Brown.

Elle quitte la route cinq secondes: « T'as pris quoi ce soir? Dis-moi, explicitement. » La blonde n'utilise aucun ton, sinon pas celui du jugement, pas l'impardonnable, elle n'a rien à lui reprocher, il a, au contraire, tout ce qu'il faut.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyLun 28 Jan - 0:14




Les résidus de ce liquide toxique occupait encore les recoins de cet esprit étriqué. Ca collait comme une vieille tache de graisse entre deux tuyaux rouillés, fuite gluante qui fait dérailler le système. Et dans la tête d’Ambrose Brown, ça résonnait comme un vinyle rayé, l’énorme fissure incrustée dans le disque bousillait le mécanisme. Et les paroles des chansons se coupaient en morceaux irréguliers qui perdaient tous leurs sens.

Le moteur chauffe sous le capot, les roues couinent sur la route inondée par la pluie, ça clignote un peu trop fort entre les phares des voitures. Puis ça ralentit, la banquette cesse de vibrer sous le mouvement de la bagnole, la voix brisée de Robert Smith mourrait sous les ondes aléatoires de la radio. Et le contact a finit par se rompre.

Les mots de Roxanne rongeait l’air conditionné défectueux, le courant d’air invisible brisait les échanges de regards sans casser le silence. Il n’était pas prêt. Pas prêt à avouer qu’il était détraqué. Détraqué, comme sa famille, comme son frère, comme l’image imaginaire qui pouvait circuler dans les yeux des plus naïfs.

« Je ne vois pas de quoi tu parles, Roxanne. »

Ambrose Brown empestait le déni orgueilleux de l’enfant modèle. Peu importe que ses yeux soient encore rouges et gonflés. Peu importe que ses lèvres soient encore bleus et froides. Peu importe que ses cheveux soient encore désordonnés, emmêlés. Peu importe que ses vêtements soient encore froissés, ses boutons de chemise confus. Ambrose était incapable de retirer cette couche de perfection qu’il s’entêtait à étaler sur sa personne, combien même il dégoulinait de honte.

Le soupir s’échappe sans retenue, le brun est soudainement captivé par le mouvement des gouttes de pluie contre la vitre trempée. Une course entre elles, la première prend un virage, fusionne avec la deuxième pour devenir plus imposante et continue sa route en un ultime sprint. « Pourquoi t’es venue ? Je maîtrisais la situation. ». Et l’éternel escroc n’osait même plus regarder sa victime dans le blanc des yeux.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyLun 28 Jan - 21:41

La machine fit un méchant rugissement quand Roxanne freina d’un coup, appuyant si fort sur la pédale qu’elle craignait d’avoir foutu le moteur en l’air. Le véhicule arrêté, le manège pouvait cesser de tourner sur ses mécanismes rouillés. « Tu penses que c’est le bon dieu qui m’a fait toquer à ta porte, Rosie? » Ses mains se resserrèrent sur le volant, elle s’était tournée vers Ambrose. Devant eux le feu du passage était rouge fumant, dégouliné par les torsades folles de la pluie. Elle battait très fort, pluie en colère, pluie vindicative, les pupilles de Roxanne avalaient presque la couleur de ses yeux, elle amenait déjà ses phalanges nerveuses à sa bouche pour les mordiller.

Voilà où était la tragédie de la scène, il avait été sans doute propulsé par le choc de la petite rage de Roxanne mais ça ne l’aurait pas aussi bien tué que ce qu’il avait dans le sang. Il n’était pas le seul objet de la mauvaise comédie de Roxanne, seulement un symptôme. Elle revenait, elle avait tout manqué, tout gâché. Avec elle, des bouts d’humains mais très peu d’hommes, dès qu’elle osait marcher en ville, le souvenir rude de cette tombe abattue lui revenait, la claque mentale de sa belle-soeur lui fendait le corps en deux, la faisait se traîner sur des kilomètres comme le ferait bientôt la bicoque de ce foutu Dexter. Un ami, dirait-elle.

Et Ambrose, qu’était-il? L’ombre de lui-même? Un de ces rescapés dont elle se serait occupé pendant la messe du Dimanche, celui qu’elle aurait imploré, devant lequel elle se serait mise à genoux dans l’espoir de le voir se sevrer? Avait-elle provoqué tout cela? Ne serait-ce que la moitié. Elle baissa la musique de ses doigts tremblants, personne ne roulait à cette heure-ci, seulement les voitures de police nerveuses. Elle pourrait le dire à son frère: Un de mes amis a fini la tête à l’envers dans une baignoire ce soir, Walter.
Mais elle n’avait plus l’âge, plus l’âge de rapporter ses bêtises aux plus responsables, alors pourquoi lui, en faisait-il une aussi grosse. « Pardon j’ai besoin d’une minute, c’est tout. »

Son pull montait jusque par dessus sa tête dans un mouvement las et très lent, les cheveux électriques, elle le mettait en boule et le jetait dans l’espace étriqué entre eux deux.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyVen 1 Fév - 16:15




Les couleurs des phares de voiture furtifs se fondent dans les bulles translucides que forment les gouttes de pluie. Elles restent immobiles, au même titre que cette bagnole, la course s’est terminée par un filet d’eau incrusté dans le mécanisme de la vitre. Les yeux d’Ambrose ne les lâchent plus, il lui semble presque qu’elles se déforment, tourbillonnent contre cette plateforme presque invisible, et quelque part, ça a l’air tellement vrai qu’il pourrait presque y voir les contours d’un visage familier. Une capsule. Deux. Trois ? Le sang bouillonnait encore dans ses veines et il n’était plus sûre de pouvoir contenir cette amertume qui lui pourrissait la langue.

« Le bon Dieu, hein … ». Quelle fascinante perte de temps qu’étant l’euphorie divine que les plus croyants trouvaient dans l’adoration de ce culte imaginaire. Il y laisse un rire muet, un rictus acide. Et plus il les fixe, plus les gouttes semblent s’esclaffer avec lui. Un écho de rire hante ses oreilles et ça en devient insupportable. « Un bon Dieu. Laisse-moi rire. ». Si cet univers était régi par un quelconque Dieu, tout portait à croire qu’il n’avait rien de bon.

L’air se charge d’une électricité particulière, chaleur insupportable qui véhicule le parfum particulier de Roxanne, griffure de la réalité qui ranime les démangeaisons dans son bras. Ambrose la regarde enfin. Le tissu épais glisse entre eux, elle a des mèches de cheveux qui s’envolent, s’emmêlent, et leurs mouvements quasi-statiques empruntent des gestes lascifs, les prunelles du garçon retombent irrémédiablement sur ce visage. Bouille blanche et rose, les billes bleus sont toujours aussi grandes et finalement, le rire d’Ambrose se relance, avec la même ironie.

« C’est marrant que tu m’parles de Dieu comme ça. T’as pas réussi à tourner le dos à Jésus, ton petit chéri, hein ? ». La banquette couine alors que la silhouette d’Ambrose se rapproche. « Roxanne, la parfaite petite fille des beaux quartiers. Celle qui va à l’église avec sa plus belle robe et qui aime chanter dans la chorale. ». Il y a cette ombre qui dévore tout ce qui l’entoure, et les phrases des voitures s’allient pour construire les ailes de l’ange déchu qu’est devenu Ambrose Brown. Ses doigts saisissent le menton délicat de la poupée, son souffle meurt sur les lèvres roses de Roxanne. « La Princesse Bishop est-elle aussi sage qu’elle le prétend ? ». Le garçon doré s’effrite sous le tonnerre d’une colère fantomatique.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptySam 2 Fév - 15:33

« Pourquoi je lui tournerais le dos? » Le chapelet commence à se manifester autour du cou de Roxanne, mélange de fidélité et de respect, fusion inutile puisqu’elle est de plus en plus coupable, peine à trouver l’enfant docile qui se pliait à ses soeurs pour mieux leur correspondre. Elle n’avait pas porté l’habit, elle n’en était pas digne, elle aurait pu le lui dire. Mais si Roxanne remettait sa propre foi en question, qui serait capable de la rappeler à l’ordre, si elle même ne croyait plus au sauvetage, alors qu’il l’avait fait. Il lui avait ramené son frère, il avait pris autre chose en échange, il avait pris énormément. Etait-elle un monstre de se réjouir, était-elle un monstre d’attendre impatiemment que le bonheur de sa famille éclose de nouveau dans le bouquet fleuri de la naissance? Il n’y avait aucun corps. Pour Dexter. Pour Camden. Rien à enterrer, pourquoi s’en vouloir, aussi férocement que voulait s’abattre la pluie sur le capot, elle luttait contre les pensées, Roxanne voulait l’accabler de questions à la place. Quand est-ce que tu as vu les garçons pour la dernière fois? Et ton frère? Pourquoi tu fais ça?

Ambrose ou la deuxième personne éveillée au creux de ses veines se tournait dans sa direction. Elle craignait qu’il n’y ait plus grand monde maintenant, juste elle, l’apprentie d’un dieu et lui, celui qui riait au nez de son guide. La ridicule décharge la piqua au visage quand Ambrose la touchait. Roxanne tenta de revenir sur la route sans appuyer sur la pédale pour autant. « De quoi tu parles? » Elle tentait de passer outre le regard vitreux du jeune homme, là où les drogues semblaient l’avoir annihilé, du moins un morceau de lui, les pointes sèches de ses mèches blondes agressaient le grain sensible de sa peau, elle remarquait celle d’Ambrose, marquée des nuits sans sommeil et des cauchemars sans fin. Elle avait échappé aux siens, mais pour combien de temps?
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyDim 3 Fév - 1:23





Ambrose, ça faisait trois ans qu’il était sans cesse en colère. En colère contre ses parents, qui ne poursuivaient que des fantaisies mystiques, s’éloignant de la réalité par tous les moyens. En colère contre ses amis qui avançaient dans des directions aléatoires sans jamais un regard sur le passé. En colère contre Jeff, ce frère disparu qui prenaient du retard sur les autres cadavres sortis de leurs tombes, marchant tranquillement dans les rues d’Aster Cove. En colère contre lui-même, qui perdait le contrôle de ce corps, de cet esprit, il devenait aussi détraqué que les mauvaises langues le disaient.

Ses mèches brunes encadrent parfaitement ce visage de porcelaine et elle semblait trop fragile pour les mains du démon. Ses doigts continuent leur ascension sur l’ensemble de sa joue, caressant la peau fraîche d’une photo cornée, la parfaite petite fille de la jolie maison du quartier. Ses yeux bleus qui débordaient de larmes devant la tombe du disparu et cette souffrance qu’ils partageaient silencieusement, tous les deux. Puis elle est partit sans se retourner, sans le regarder, comme tous les autres. Il était seul.

« Vraiment, Roxanne ... ». L’acidité du liquide mortel déforme la voix du garçon, un mélange de tonalité grave et d’un mystérieux timbre, le genre de mélodie qui fait battre un coeur trop vite, trop fort, qui glisse, la vipère vocale qui s’enroule autour de la gorge pour étouffer sa victime. « ... Tu poses trop de questions. ». Les souffles se sont coupés dans l’union de leurs lèvres, fusion ardente des pétales de chair, tourbillon de folie qui faisait perdre la tête.

L’électricité statique attire le corps d’Ambrose vers celui de Roxanne, comme si la vieille voiture avait rétréci pour les rapprocher. La main puissante s’écrase sur un côté de la vitre embuée, l’autre découvre la nuque de l’ingénue. Le sang de Brown bouillonne, il actionne un mécanisme oublié, il sait où la toucher pour diffuser le venin qu’il a dans la bouche, et ça va toujours plus loin dans la danse langoureuse qu’il ne maîtrise plus. Les angoisses d’un enfant trop parfait nourrissent le portrait déstructuré d’un pauvre fou torturé.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyDim 3 Fév - 17:08

La radio passe en fond, à bord d’un sous-marin musical dans lesquels les marins se perdent et heurtent les récifs, Roxanne sent qu’ils vont se heurter mais elle tente d’entendre les accords déchaînés de l’artiste sur son air de fin de soirée. Elle ignore cependant s’ils vont percuter les routes inégales de la région ou se faire happer de plein fouet par un véhicule, image morbide mais Roxanne traîne dans une morgue où les portes de sortie s’ouvrent sur d’autres funérariums et cercueils dévoilant des corps en charpie. L’imaginaire de Bishop est puissant, elle n’a rien pris, elle, la torture se fait seule, gratuitement on lui implore de se repenter. Un sursaut quand leurs bouches se tailladent, elle veut se détacher mais la pression est féroce et électrifiante. Le bruit familier du glissement contre la buée d’une vitre la fait se crisper, se tendre, quand elle se détourne dans un premier temps Ambrose se cogne à son menton. Roxanne inspire.

Ils la regardent où qu’elle soit, elle n’échappe pas à ce jugement divin, celui qu’on lui apprend à propos d’un passé névrosé, de ses ancêtres solidaires dans le dédale des dieux les plus cruels, et les guerres s’enchaînaient autant que les baisers d’Ambrose Brown. Et Roxanne avait le choix, elle susurrait: « Ça te rend fier ce que t’es en train de faire? » Son corps fourmillait, elle tremblait, elle le regardait, il était malade. Le rouge s’étalait partout en traces monochromes dans sa composition claire, immaculée, la moindre imperfection ressortait comme un coup de poignard, elle marquait beaucoup, énormément. La main de Roxanne traînait sur le corps excédé du garçon, elle venait de se rendre compte, elle fit deux petites tapes avec sa paume, ses yeux clignaient, elle ne le regardait pas dans les yeux.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyDim 3 Fév - 18:20




Le contact physique n’avait jamais été une priorité pour Ambrose. Le contact dans son ensemble, d’ailleurs. Il pourrait s’enfermer dans sa chambre avec un tourne-disque pour l’éternité, sans voir personne, sans boire ni manger, il s’en porterait très bien. La solitude était une amie précieuse qu’il chérissait pour ses qualités paisibles, les échanges humains n’étaient que superflux, contraignants, toujours à se toucher, se parler, communiquer, Ambrose, il voulait juste qu’on le laisse tranquille.

Pourtant, ça se réchauffe au bas de son ventre. Un mélange étonnant d’une colère qui nourrit ses muscles depuis trop longtemps, d’un désir interdit inédit qui lui est encore étranger et il en oublie de reprendre son souffle entre deux baisers arrachés. Et il sent ses mains sur son corps fatigué, il entends sa question amer et ça le ferait presque rire. « C’est bien ce que je disais. Tu poses trop de questions. T’en as pas marre ? ». Ambrose, il est fatigué de toujours garder le contrôle quand il veut se laisser aller.

Dans ses fantaisies délirantes qu’il décryptait entre les lignes du carrelage de cette salle de bain, Ambrose arrivait parfois à voir son reflet dans la moisissure d’un carreau brisé. Jugement dans les yeux, moue agacée au coin des lèvres, ça le transperçait, ça l’enfonçait, tout au fond de cette baignoire, ça le noyait dans un océan invisible et ça finissait par l'étouffer, les bulles d’air remontaient jusqu’au plafond avant d’éclater.

Son dos parait imposant vu du dessous, et toute la silhouette de Brown gonfle alors que ses mains glissent sur ses épaules féminines. « En attendant, tu ne m’as pas dit d’arrêter, Roxanne. ». Et il continue, l’air chaud qui s’échappe de ses lèvres dévore la gorge de la princesse, prépare à la morsure enjôleuse d’un baiser tranchant. Et au creu de son oreille, il peut entendre le mélange de la vieille radio et de la respiration irrégulière de la demoiselle. Objet des convoitises masculines de sa génération, tous les garçons la regardaient alors qu’il n’avait d’yeux que pour les pochettes psychédéliques des albums qu’il collectionnait.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyDim 3 Fév - 22:42

« J’essaie de comprendre ce qui s’est passé pendant que j’étais pas là, putain. » Le bruit des essuie-glace était régulier, en berceuse traitre, Roxanne restait concentrée, le coeur en vrac dans son rythme injuste, les réponses naturelles, plus de deux ans sans toucher personne autrement que pour déposer des hosties au bout d’une langue, elle n’était pas dans son élément. Non, Roxanne n’avait plus l’habitude. Elle pourrait parler de ce que c’était de n’enlacer personne, de cajoler avec des prières, si on appelait ça de l’humanité, ce n’était pas très humain, personne ne se touchait, tous se repentaient. Elle se souvient encore des murmures dans le confessionnal et des premières semaines où elle y avait passé plus de temps qu’il ne fallait. Roxanne n’avait plus l’habitude. Le retour à Aster Cove était plus violent qu’elle ne l’avait imaginé, elle s’attendait à recevoir beaucoup de violence, de colère, de rancunes, des poings perdus dans le vide, des cris, des larmes.

Lui était très silencieux, très lent. Ambrose était déphasé et pourtant il paraissait honnête, il paraissait s’accorder avec ce ton parfois corrosif comme un dangereux mélange. Il lui rappelait les silhouettes affalées sur les bancs de l’église parlant au Seigneur ou à eux-mêmes, cherchants une consolation dans les hauteurs du plafond. Lentement il la transperçait: Il avait raison, elle ne disait pas non. De tous les échanges depuis son retour c’était le plus déconcertant, de tous les échanges c’était celui qu’elle tentait le plus de comprendre en vain, elle commençait à sentir le sang pulser contre les parois de son crane. Elle se dégageait appuyant sur l’accélérateur, la voiture fit un bruit nerveux, aussi transporté qu’elle, ils se mirent à aller d’abord sur la route, elle voyait le compteur grimper, puis ils la quittèrent, dans le champ la voiture les faisait remuer, ils roulaient de plus en plus vite, Ambrose avait encore une main sur elle, tandis qu’elle tentait en vain de se vider la tête. Autour personne n’était là pour assister à la course de l’engin qui fonçait dans le décor, dangereusement, aux abords du motel la nuit dévorait tout, même Roxanne.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyLun 4 Fév - 0:30




La peau de Roxanne n’a rien plus rien de délicat. C’est tendu, c’est chaud, et les paroles continuent de fuser, ça cogne contre la tête d’Ambrose. Il fallait toujours une explication, de la rationalité pour les esprits trop étriqués, sa réalité à lui commençait à prendre la forme de ces couleurs qui dansaient contre le plafond de cette salle de bain moisie. Et d’un coup, la chaleur de l’excitation est morte enterré par la migraine qui faisait vibrer son cerveau.

Les silhouettes se séparent dans le vrombissement de la bagnole, les mains sont pas très loin cependant. Y’avait cette électricité qui planait encore, on savait plus trop si c’était bon ou mauvais signe et la banquette épousait le corps avec un peu plus de force, autant que la pédale se faisait écraser sans remord.

Et d’un coup, Ambrose, il s’est mit à rire, l’adrénaline ravivait le poison qui occupait ses veines, et ses paroles couvrait la mauvaise musique. « Tu veux savoir ce qu’il s’est passé, hein ? ». Le poing vengeur assomme la radio fatiguée, la voix d’Ambrose éclate à la place de la guitare électrique. « Ils reviennent, Roxanne. Ce gosse qui passait son temps à fuguer, ce connard d’Holland, cette bonne femme dont le mari s’tape toutes les pouffiasses du coin. Même ton frère. Ils sont revenus ! Ils sont revenus mais pas-Putain Roxanne, ralentis ! ».

La colère formait de petites explosions à chaque fois de sa boîte pensante, Ambrose Brown, il était en colère. Constamment. Depuis trois ans. Il ne cessait d’être en colère. Et voir Roxanne se barrer, son frère se pointer, et elle revenir comme une fleur avec sa récompense familiale sur un plateau d’argent, ça le rendait malade. Oui, il était à bout. Pas parce qu’il passait son temps à souffrir de l’absence de son frère. Mais parce que la seule façon pour lui de ressentir son absence, c’était d’infecter ses circuits avec le venin du serpent psychotique qui glissait sous sa peau un peu plus chaque jours. « Ça s’barre deux ans et ça revient pour jouer les rebelles. Laisse-moi rire. »
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyLun 4 Fév - 7:48

« Tu sais rien du tout. » Hachait-elle dans le vide de la descente aux enfers. La pluie battait, instinct meurtrier, si elle avait pu assener des coups ils ne seraient déjà plus là à s’enfoncer dans le paysage, il la rappelait à l’ordre, elle appuyait plus fort. Ça lui rappelait les coups de folie de Dexter, il resserrait les mains sur le volant, elle le regardait du siège passager, Roxanne, persuadée qu’une énergie révoltante l’habitait. Mais pour la jeune Bishop c’était tout autre chose et si le volume de la radio n’avait pas monté en décibels, ça n’empêchait pas la musique de résonner plus fort dans les cages vides leur servant de têtes. « Y a autant de risques que tu meures en percutant un arbre qu’en te plantant une aiguille dans le bras Rosie. »

Roxanne sentit le nombre de tours grimper et grimper, ils avaient de la marge, aucune construction ne venait encombrer la plaine, c’était ici que devaient se dérouler les spectacles les plus tragiques. « Mais tu vois toi tu es encore là et pourtant t’es même pas foutu de me dire ce que t’as pris. Alors dis-moi, dis-moi! » A travers le pare-brise, elle pouvait voir la forêt s’approcher dangereusement, les pointes des pins remonter jusqu’au cieL. Elle ne lui parlerait pas de celui qui veillait sur lui, même si elle y croyait dur comme fer, que ce soit Jeff ou une entité moins identifiable, il aurait dû savoir. Roxanne haletait, finalement elle fit un glisser la voiture sur le côté, un de ces tours que Dexter lui avait appris sans doute, les perles de son chapelet frottaient contre sa nuque et pourtant elle n’avait pas envie de prier pour qui que ce soit.

Elle veut lui peindre le tableau, lui au milieu de rien dans une vieille chambre où plus personne ne passe sans honte, elle à qui on a conseillé de ne pas trop se mêler mais qui ne pouvait pas voir le même visage plus d’une fois. Elle cherchait les chutes d’une amitié, les morceaux d’un vase cassé sans comprendre pourquoi il était presque hilare, ou était-ce de l’indifférence? Toujours est-il que quand le véhicule se stoppa net en plein milieu du champ elle restait les yeux mouillés et le souffle coupé.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyLun 4 Fév - 16:17


Les aiguilles de sa montre semblent tourner à vive allure. Une course effrénée pour devancer les chiffres, boucle continue, un continuel retour en arrière, il n’y a jamais rien de plus après le douze, nombre symbolique, et les chiffres se déformaient pour hurler les Tic Tac du mécanisme, bruit incessant couvert par les crissements des pneus. Le temps était un redoutable prédateur, les minutes dansaient ensemble et l’effet capturait l’intégralité de son cerveau. Le cadran a une forme qui le fait rire. Sa montre n’avait même pas d’aiguilles.

Les muscles ont fondus contre la banquette et les lèvres encore imbibées de celles de Roxanne, elles ne cessent de sourire, un rictus dérangeant qui recouvre l’intégralité de ses joues. « C’est mignon, tu trouves pas ? L’arbre qu’on va percuter par ta faute aura donc les mêmes conséquences que les trois capsules que j’ai avalé de mon plein gré ? Intéressant. ». Morceaux de plastique cylindrique, le liquide translucide les accompagne dans cet étroit couloir avant qu’elles ne libèrent leur savant mélange, poudre qui se raccroche aux vaisseaux pour faire éclater des paillettes dans cet amas de neurones. Et c’est pour ça que le temps était précieux. Parce que tout ce périple en avait besoin.

« Tu veux faire le compte ? Bon, si tu insistes. Un buvard, au début. Pour commencer, pour voir ses yeux. Une capsule pour ses boucles. Une deuxième pour son sourire. Et parfois une troisième juste pour entendre son rire. Et quand ça ne suffit plus, l’aiguille termine le tout. Mais les trois ensemble, ça ne fait pas bon ménage, alors on laisse l’eau couler et on alterne les tours, parce que c’est plus simple de se lever pour aller travailler. Et parfois, même, je me dis qu’une petite goutte les auraient fait rester, les deux mélomanes. Mais toi, t’es revenu, il est parti alors est-ce que ça prouve quelque chose ? J’en sais rien, même le plafond n’a pas la réponse et je commence à avoir très soif. »

Les mots avaient dégringolés de sa bouche, ils se bousculaient, voulaient tous sortir en même temps, une foule d’ado fatigués qui s’agitent comme des puces à un concert des Beatles, et ça ne s’arrêtait que quand il n’y avait plus à boire et quand le véhicule s’est arrêté, le corps d’Ambrose s’est laissé aller contre l’épaule de Roxanne, son rire silencieux ne voulait même plus s’arrêter.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyMer 6 Fév - 1:35

Bientôt il ne resta que la pluie battante et le décor tiraillé de ces fils incomplets se superposant les uns aux autres. Depuis qu’ils partageaient l’espace de la voiture, Roxanne ne se souvenait pas avoir regardé Ambrose dans les yeux, elle tombait sur ces longs détails striés sur la peau du mélomane, elle courait pour reprendre la route et sa longue ligne règlementaire disparaissant sur les plus vieilles parties. Le moteur commençait à cracher, Roxanne le coupa, il parlait. Ambrose elle ne se souvenait pas de lui comme étant quelqu’un de spécialement bavard. Elle le pensait habité par une présence étouffante, petit à petit elle parvenait à remonter d’elle-même dans sa gorge et à s’échapper. Roxanne ne s'était jamais occupée d'une personne droguée, les petits débordements d'Holland ça ne comptait pas.

Roxanne passa une main sur sa joue et elle fondit lentement vers le menton, quand elle l’entendait elle ne pouvait pas s’empêcher de revenir aux sorties qu’ils faisaient avec les garçons. La question tournait dans sa tête: C’était quoi ça? Qu’est-ce-qui t’a pris? Les yeux de Roxanne étaient surmontés de cils bruns et épais, quand elle vous regardait elle donnait le sentiment de vraiment le faire, pas de désistement à droite ou à gauche, on la pensait brave fille. Beaucoup de choses en fait, dans le souvenir d’Aster Cove, Roxanne rôdait sur les photographies de l’album du lycée, derrière les vitrines en tête d’affiche: La petite surdouée des Bishop dirait-on ou simplement l’étudiante la plus remarquable de cette année-là parmi d’autres aussi inoubliables qu’elle, c’est-à-dire évaporés dans la nature.

Elle se posait la question une deuxième fois, autrement: Reprends-toi, tu vois pas que t’es en train de perdre la tête? Il énumérait Ambrose, Roxanne suivait difficilement, elle était venue pour ça, elle n’était pas encore repartie et n’était pas bredouille non plus, « C’est bon, c’est bon t’es défoncé j’ai compris. » Le poids de Brown sur son corps plus frêle qu’on ne l’imaginait après tant de batailles intérieures la faisait atterrir contre la portière, elle inspirait et expirait le plus lentement du monde, elle regardait le ballet des essuie-glace, espérait se volatiliser, finir ailleurs, elle était poursuivie par les derniers mots d’Ambrose, endeuillés, elle pensait y échapper, à l’enterrement constant, au jeter de terre répété, elle pensait.
Elle revoyait Camden dans le siège passager en train de changer les stations pour mettre du classique, Debussy, Rêverie... elle se souvenait qu'ils restaient là parce que l'intérieur était mieux que l'extérieur. L'intérieur valait mieux, Camden, le ciel pleurait. Roxanne redressa la tête comme elle pouvait, observait Ambrose. Ils pleuraient tous.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyMar 19 Fév - 15:38


La chaleur commence à être insupportable, au point où les degrés font fondre la toiture, forment des trous ridicules tout autour de lui, et ça grésille d’une manière particulière, comme un essaim d’abeilles qui fusionnent en une silhouette familière. Ambrose, il sait plus où se mettre dans cette voiture cabossée, la banquette lui dévore le dos et seul le contact des doigts de Roxanne l’ancre un tant soit peu dans ce qui se rapproche le plus d’une réalité.

Les mots de la brune sont indépendants les uns des autres. Ils se chamaillent entre les tympans d’Ambrose, ça fait de la musique, mais pas si bonne que ça, et y’a qu’un rire sec qui accepte de répondre à ses remarques. « T’as posé la question, te plains pas de la réponse, chérie. Encore plus quand tu la connais à l’avance. ». Sa langue lui joue des tours, elle refuse de tourner dans sa bouche avant de laisser la mélodie logique encombrer l’espace. C’est insupportable.

« J’ai chaud. J’ai trop chaud. Et soif. Et faim. Non, pas faim. Soif. J'étouffe. Je meurs. Oh, si seulement. Au moins, j’aurais plus à supporter les sales gueules des affiches. ». Ça bégaie, ça accélère, ça se mord la langue, Ambrose, il a les doigts qui tremblent contre les boutons éclatés de sa chemise froissée. Ça arrête pas de grimper dans sa cervelle et il arrive plus à suivre le fil de sa propre logique.

D’un coup, la porte s’envole, le tissu ne couvre plus son torse et la silhouette du jeune homme se perd déjà sous les cordes d’eau qui tombent du ciel. Ses poumons s'échauffent. « Je t’ai dit que j’avais soif, pourquoi tu m’as pas dit que l’eau tombait du ciel ?! ». Les pieds humides contre le bitume boueux, Ambrose a perdu la tête, levée vers les cieux, la gueule ouverte en espérant que la sécheresse passe toute seule. Il ne regarde plus personne, juste les nuages imposants qui tentent de le désaltérer à sa convenance. Les capsules, y’en avait trop, ce soir et ne pas être dans sa baignoire habituelle, ça le rendait encore plus instable. Pourquoi elle est venue me chercher ? J’ai rien demandé. Je lui ai rien demandé. Putain. Mais les pensées d’Ambrose sont étouffés par les feux d’artifices qui faisaient briller ses yeux.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyVen 22 Fév - 20:11

« Qu’est-ce-que tu fais? » Il disparaissait dans le chaos du dehors, la porte ouverte laissait le son terrible des trombes d’eau s’abattant dans le décor et contre la ferraille pendant que Roxanne était en sécurité, les pieds encore posés sur les pédales. De son siège conducteur elle ne craignait rien, ni la pluie ni le personnage fou qui l’avait accompagnée jusque là. Elle tournait la tête en voyant le cuir se couvrir de gouttes et noircir sous la lumière de l’auto. Roxanne se calait, les mains sur le volant, elle évitait le rétroviseur, elle y aurait croisé ses yeux et elle avait suffisamment honte comme ça.

Elle avait conscience qu’Ambrose s’éloignait mais elle devait sortir de sa propre transe, elle devait quitter l’espèce de tremblement qu’elle remarquait au bout de ses doigts, impossible. D’ici la vieille bagnole ressemblait aux radeaux dans les tempêtes ou à ces bouts de bois sur lesquels les naufragés se mettaient à flotter dans l’espoir de voir la terre venir vers eux avec le vent pour les pousser dans la bonne direction si les vagues ne les renvoyaient pas à l’opposé. A présent Roxanne grelottait, elle cherchait son pull sans le chercher. La jeune Bishop ne pensait pas tant à celui qui venait de détaler, elle laissait la pluie filtrer les informations le concernant, la seule pensée capable l’habiter concernait la ville toute entière et c’était qu’elle ne savait plus rien de l’endroit où elle avait grandi.

Alors doucement elle se laissait aller à la fatigue mais quand sa tête tombait, elle, somnolant sur le volant, Roxanne déclenchait le klaxon et le bruit hurlait dans la surface, se traînait dans le déluge, retentissait un sale coup. Roxanne avait sursauté, le coeur avait comme redémarré, elle haletait, elle bredouillait quelques plaintes pendant que son genou gauche remuait sans s’arrêter.
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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyMar 18 Juin - 23:30


C’était comme une seconde peau, couche invisible de liquide aérien, tes mains grattent la surface à la recherche de la chaleur de ses joues creuses. Une, deux, trois gouttes glissent dans sa gorge, il boit le sang des nuages pour étancher une soif infinie. Les cris de Roxanne se frayent un chemin jusqu’à ses oreilles, ils combattent vent et pluie dans l’espoir de l’atteindre. Mais Ambrose, il peut pas s’empêcher de rire avec le tonnerre.

Les muscles lâchent, sa silhouette n’est plus qu’un tas de chair désarticulé qui s’agite. Ambrose, il est persuadé d’avoir une quête, d’avoir un but mais il a beau se creuser la tête, impossible de mettre le doigt dessus. Tous les habitants de cette foutue ville avaient un rêve, pourtant. Trouver un mari, une femme, fonder une famille pour rentrer dans la norme américaine de ce siècle. Trouver un travail, gagner de l’argent, s’enrichir toujours plus et devenir le rouage sans saveur d’une société capitaliste. Mais Ambrose, il cherchait ni l’un, ni l’autre. Alors qu’est-ce qu’il fout ? C’est le hurlement du klaxon qui fend l’air pollué par des questionnements sans fin.

Le mouvement aléatoire de la boue trace le chemin vers ce carrosse de ferraille, le tissu de ses vêtements fondent au bout de ses doigts, et il a la silhouette alourdie par le poids des hallucinations qui lui passent par la tête. La main de Jeff, il la sentirait presque cogner contre la vitre glissante à la place de la sienne, Ambrose et son regard perdu dans le vide intersidérale d’une mélodie imaginaire. « Tu viens pas danser ? T’entends pas la musique ? Aller Roxie, fais pas ta prude ! ».

Le sablier a terminé sa course contre le temps depuis quelques minutes déjà, le courant électrique des petits carrés s’est déjà logé entre ses neurones, Ambrose Brown n’est plus capitaine du navire de la réalité. Et la porte n’est plus l’obstacle qui sépare les deux corps, la main du mélomane saisit la sienne, et l’attire dans son rituel aléatoire, la mélodie d’Elvis et ses chants amoureux. « J’ai juste besoin de lâcher prise. J’en ai besoin, tu comprends ? ». Ambrose, il a disparu en même temps que ces visages mal imprimés sur les vieilles affiches du commissariat.

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MessageSujet: Re: (ambrose) les sanglots longs des violons   (ambrose) les sanglots longs des violons EmptyDim 23 Juin - 1:50

Elle envoya sa jambe droit dans le volant par frustration, ça lui avait fait mal, elle couinait une seconde, les yeux humides. Roxanne ignorait souvent son âge, parce qu’elle n’était plus la petite Bishop sortie fraîchement du lycée. Ça ne l’intéressait pas de compter des bougies sur un gâteau d’anniversaire, elle voulait allumer des cierges en silence jusque la fin de sa vie. Possiblement, ça avait été le plan, jusqu’à ce que la douleur pompe dans son sang.

Là quand elle se sait vivante entre battements irréguliers du coeur, panique à bord, sueurs froides, elle s’inondait de questions.
La plupart se ressemblaient cela dit. Est-ce-qu’il est à allé loin? Où il est? Qu’est-ce-que j’ai foutu? Je l’ai perdu?
Admettons, un enfant, ça se perdait, dans la foule, dans une forêt vaste après une partie de cache-cache. Elle? Si Roxanne osait tourner la tête, elle le verrait danser sans musique dans le vaste décor, maintenant devenu manteau d’horreur recouvrant l’heure à laquelle tous les gens sensés se retournent dans leur lit. Roxanne fume aux oreilles et au nez mais elle est glacée, dedans et dehors, parce qu’il aurait pu se volatiliser, comme tant de choses.

Kenny.
Camden.
Walty.
Elle.

- Ambrose.

Ses bras trempés tendus, elle se détache, vient l’attraper à mi-chemin, entourer son visage, si elle dégage toutes les vagues acides, si ça se trouve, il reviendra. Elle qui a été la première à ne pas regarder en arrière, elle comprend quand elle se fait mordre par les yeux vides d’Ambrose, elle comprend qu’il ait voulu partir. Ça ne l’empêche pas d’avoir dans l’estomac des flammes, à la pensée seule qu’elle puisse un jour le trouver au fond d’une baignoire, elle sait, dans un de ces scénarios le ramener à coups de gifles, ou le mettre sur le côté pour l’empêcher de s’étrangler en vomissant, ça ne suffira pas à le reprendre.

S’il est à l’autre bout du fil, au téléphone, alors il peine à décrocher. Elle sanglote, Roxanne, mais rien ne sort vraiment alors, les torrents dehors lui donnent ce semblant d’élan, elle voudrait que l’eau soit bénie et le lave.
Roxanne rince ses colères, avale les éclairs qui viendront la réveiller plus tard la nuit, suivant le malade dans sa naissante lubie. Ils se traînent, elle s’enfonce dans la boue. Pour lui, ils sont si ça se trouve en train de faire un long slow.

- Ok, je comprends. Il peut lire sur les lèvres de la jeune Bishop, elle l’entoure de ses bras, le protège d’un ennemi invisible, ignore les parties d’elles désireuses de partir en guerre contre quelque chose qu’elle ne peut même pas saisir.
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